5 JULY 1935, Page 19

Tricntenaire de l'Acadernie

[D'un correspondant trans-ais]

Runs a eu, Ia sernaine derniiTe, l'honneur de recevoir its personnalites les plus marquantes dans le domaine des lettres et des sciences. Ces sonunites de l'esprit repondaient is l'invitation que leur avait adressee l'Academie francaise pour la commemoration du troisieme centenaire de sa fondation.

La ceremonie inaugurate fut consacree au culte du souvenir. A la memoire du cardinal de Richelieu, fondateur de l'illustrc Compagnie, on celebra tin service religieux dans la chapelle de la Sorbonne, oa, sous le tornbeau de marbre sculpts par Girardon, repose le corps du prelat. Les premiers ranks de la nef etaient ()coupes par les membres de l'Academie et par ceux des trois autres classes de 1'Institut. La presence des nombreux delegues d'academies etmngeres conferait cette assemblee, en raison de la qualite hors pair des assistants, un éclat tout particulier.

Pour in deuxidme journee, l'Acadende francaise et ses invites se reunirent au Louvre, dans in suite des Cariatides. Cette visite commemarait le geste qu'eut Louis XIV, en 1672, en faveur de la Compagnie, qui ne possedait alors aucun domicile fixe, en lui octroyant au palais une salle qu'elle occupa jusqu' it in Revolution. C'est au tours de cette seconde seance que le Ministie de l'Education nationale, apportant aux " Immortels " l'hommage du gouVernement, mag,nilla l'esprit de continuite dont - avait fait preuvc l'Aeademie francaise pendant les trois sieeles de son existence, au' milieu de taut de bouleversements et d'evenements de toutes sortes. L'orateur adressa ensuite he salut de Paris et de la France entiere aux delegues strangers, qu'il qualifia de l'appellation de " representants les plus • grands des plus grandes academies du monde." M. Gabriel Hanotaux, direeteur de l'Academie francaise et auteur de l'Ilisloire de Richelieu, retracts alors les origins de, In Compagnie en un rarscourei historique extremement vigoureux.

Vcrs 1626, neuf amis, tous epris de litterature, avaient forme une sorte de cercle intime qui se rettnissait dans in maison. de Conrart; secretaire du roi, maison situee dam in rue St. Martin. " La, emit Pellisson, dans son Histoire de l' Academie, its s'entretenaient familierement, comme its eussent fait en une visite ordinaire." Des qu'il tut instruit de Texistence de ce club, Richelieu s'avisa d'en faire le noyau de la societe lettree qu'il await depuis longtemps de ether. Son projet devint vite une realite. rains& suivante, en janvier 1635, Louis XIII, 0, l'instigation de l'entreprenant cardinal, accordait it in jeune Academic ses lettres patente.i, qui ne furent enregistrees par le Parlement qu'en 1687.

Quant au but poursuivi par les membres de la nouvelle institution, voici coniment he depeignit M. Hanotaux " L'Aeadernie francaise, dit-il, a eV etablie par le cardinal de Richelieu pour la surveillance constante et autorisee 'de cette faculte qui est to propre de Phomme : l'expression. Les considerants de l'acte royal qui .1a tree lui donnent le Inandat " de rendre he langage francais non seutement elegant, mais capable de trailer de, tours, les arts et de toutes les sciences."

Dans l'esprit, du fondateur, les moyens propres 4 atteinclre ce but devaient consister en to redaction d'un dietionnaire, d'une grammars, d'une rhetorique et d'une poetique. ee waste programme nese trouva execute qu'en partie : soul le dictionnaire fut immediatement mis sur le chantier,; devint la principale occupation de la Compagnic. Depiiis 1094, date de la publication de la premiere edition, cet important ouvragc a etc canstamment revu et adapts aux Modifications apportees sans cesse dans le langage soit par les' decouvertes seientifiques toujours de plus en plus noni- breuses, soit par la disparition de locutions tombees en desuetude. Si, pa2rai les autres travaux projetes it l'origine, la rhetorique et In pok,ique sont demeurees dans Ie neant, la fameuse graminaire si longtenips attendue a vu le jour en 1933. On sait la controverse erudite qu'elle n'a point' manque de soulever, avec une fougue par instants epiqUe; Mais, impassible a la louange comme a la critique, PAcaderinie ri'en a pas mins conserve le prestige seculaire qu'elle dolt sans doute beaucoup moms a son oeuvre collective qu'au talent individual des quarante elus qui siegent sous sa