Pr6sidence du Conseil [D'un correspondant franiais] DANS son numero du
3 novembre 1983, he Spectator remarquait que les services franeais de la Presidence du Conseil ne dis- posaient d'aucune residence speciliquement reservee a leur activite. Notre Premier etait, jusqu'ici, contraint de sejourner dans les batiments du ministere dont il etait aceessoirement titulaire. Ii resultait de eette discontinuite perpetuelle dans l'effort un certain flottement, et une absence, aussi, de prestige profondement regrettable. La venue au pouvoir de M. Pierre-Etienne Flandin, qui est un homme d'action, et dont la persuasive energie a cu l'occasion de se manifester déjà en de multiples domaines, a permis de consacrer definitivernent la tendanee renovatrice qui orientait, depuis plusieurs mois. les esprits politiques vers l'officielle creation d'une presidence francaise. Cette realisation est, aujourd'hui, chose faite. Paris, tout comme Londres, possede desormais son 10 Downing Street ii s'appelle l'HOtel Matignon.
Eleve dans les quartiers aristocratiques de la rive gauche, cet hotel seculaire pent se targuer d'une glorieuse ascendance. Construit, en 1723, par les soing de l'architecte Courtone, qui avait sit meriter le sumom flatteur de "premier decorateur du monde," ii fut successivement habite par des personnalites illustres, au nombre desquelles ii conviendrait de mentionner he Marechal de Matignon, gouverneur de l'Aunis, he Prince de Monaco, le Prince de Talleyrand, le General Cavaignac et le Comte de Paris. Au moment oh survint la guerre de 1914, sari occupant etait 1' ambassadeur d'Autriche. Rest& vide depuis la grande tourmente, la vaste demeure a retrouve recemment affairement des grands jours. Restauree avec beaucoup de discretion, elle fait; a present, digne figure dans l' ensemble de nos palais nationaux.
Les services de la Presidence, dont le secretariat est dirige par M. Leon Noel, ministre de France a Prague, lequel
conserve son poste diplornatique en &pit des charges que represente sa nouvelle fonction administrative, se sont installes, voici quinze jours passes, a l'HOtel Matignon. lune grande simplicite a preside, d'ailleurs, a l'organisation de leurs fiefs respectifs. Groupes aut,our du bureau du Premier, cormhe autant de sections d'etat-major autour de leur chef, les divers offices temoignent d'une utilisation judicieuse des possibilites de Motel. I:elegant edifice est,' en effet, d'une allure trap classique pour ne pas avoir impose, par sa structure meme, une repartition non denuee de rigueur. Lorsqu'on a, par une vaste cour d'honneur, penetre dan.s le corps principal du batiment, on se trouve en presence de cinq salons de style dix-huitieme, aux dimensions considerables, et dont certains sont ornes de rnagnifiques Gobelins. Trois de ces pieces 'sont destinees aux collaborateurs de M. Flandin. Les deux autres, reservees an President lui-meme, consistent en un bureau de travail et en une grande salle qui abritera les deliberations des futurs conseils de cabinet.
Le salon qu'occupe, en personae, le chef du gouvernement francais, donne sur an pare tres ouvert et ensoleille, l'un
des plus beaux, certainement, qui existent dans cc quartier de Paris. M. Flandin, en prenant possession de sa nouvelle residence, n'a pu qu'exprimer sa joie de pouvoir doren- avant travaillei dans cc cadre a la fois grandiose et repOsant.
L'installation du President du Conseil s'est effectuee des son retour de Londres. Et il est bien qu'elle ait assume,
ainsi, failure d'une offrande faite a son chef par la nation,
reconnaissante de I.' oeuvre aecomplie. Les entretiens franeo- britanniques ont, veritablement, touché an coeur le pays de France. Notre opinion publique, qui avait garde precieuse- ment le souvenir des epreuves traversees en commun, s'est ernue sincerement de la grandeur d'une amitie anoblie et vivifiee par un meme desir de iaaix durable en Europe. Le projet de convention aerienne, dont la valeur realiste a souleve dans les esprits tine immense esperance, est apparu en par-
ticalier eonune le synabole d'une etape decisive sur Fingrat chemin du desarmement moral. L'Angleterre et la France out quelque droit de se sentir fieres d'avoir solennellement affirme leur volonte loy-ale de mettre en toute franchise, comm- e en toute lunniere, les forces de l'oidre au service de